Jean-Bernard Papi, romancier, essayiste, nouvelliste et poète

                                        Il n'y a de recette de jouvence que le rire.
                       Partageons nos plaisirs. Vous lisez ! J'écris !      
Dans la troupe, je citerai :
Salmon, sergent major de la 1ère, grand entraînement.
Rougier, soldat à la 2ème, soldat bien dévoué, gravement blessé en ramenant un de ses camarades, moral très-élevé ;
Plumiau, soldat à la 4ème, quoique blessé sérieusement à la cuisse, n’a pas voulu être emporté avant l’issue de l’affaire et tirait toujours.
Bauer, sergent à la 4ème sous officier âgé mais rempli de vigueur comme un jeune homme.
Cosson, soldat à la 2ème, 3 chevrons, grande bravoure, bel exemple aux jeunes soldats.
Harmand, soldat à la 1ère. Toujours en avant de sa compagnie.
Devèze, soldat à la 2ème, a eu les cuisses traversées en marchant bravement.
Filias, soldat à la 4ème. Tombe dans une embuscade, s’est vigoureusement servi de sa baïonnette.
  Tous ces hommes, selon moi, mériteraient des récompenses signalées.
   En outre, j’aurai l’honneur de vous remettre une liste d’hommes qui mériteraient bien les compagnies d’Elites avec un beau libellé. Je ne puis pas non plus, Mon Colonel, ne pas mentionner la conduite fort digne des deux majordomes du convoi :
Dastas, 1er majordome qui a été blessé gravement à la main.
Pourrière, 2ème majordome qui s’est occupé de la dernière voiture si gênante.
  De plus, un arrièros, attaché au convoi, a fait très –bravement le coup de feu, c’est un garçon qui a d
u cœur, le nommé Martinez. Je crois que ces trois personnes mériteraient au moins une parole des plus flatteuses.
  J’arrive enfin au chiffre de nos pertes : 7 tués, 5 blessés, total 12 hommes hors de combat. Ce sont des pertes sensibles mais qui semblent encore modérées lorsque l’on songe que le détachement avait à faire à des forces si supérieures que l’ennemi assassinait en quelque sorte d’un terrain bien étudié et préparé. Et, cependant en dépit d’avantages si considérables il a été débusqué et dispersé. Ses pertes d’après les rapports les plus modestes sont de 40 à 50 hommes tués ce qui fait supposer un nombre de blessés fort important. Plusieurs ont été tués à la baïonnette tout proche des voitures, car il y avait de la part de l’assaillant une audace qui tenait, je crois, à la certitude qu’il avait de nous enlever.
   De plus, pendant l’affaire, huit mules de renfort libres, effarées par la fusillade, ont pris la fuite dans les bois. Deux mules ont été blessées aux voitures. Enfin le convoi a été mis en marche doucement, avec ses blessés, ses morts chargé, moins celui qu’il a été impossible de trouver. Nous sommes repartis avec une belle contenance, sans précipitation ni tapage, comme des gens qui ne s’en vont pas mais qui marchent à leur destination ; on se tenait sur ses gardes, prêt encore à montrer vigoureusement les dents, car la troupe était fière d’elle- même et dans l’état moral le plus brillant ;
   Mais il n’y eut que des coups de fusils isolés qui ne méritaient pas la riposte. Nous sommes arrivés à Puente Nacional vers 1heure ½.
   Pour mon retour outre la mort de trois malades de l’hôpital, 1 homme du 51ème de ligne et 2 zouaves, je n’ai qu’un fait à signaler : à la Rinconada, j’ai envoyé une corvée à l’eau sous la protection d’une section du 62ème  et d’une  section de zouaves, elle a été accueillie par un feu de 30 à 40 fusils déchargés à la fois ; un zouave a été contusionné ; le terrain ne permettait pas de donner la chasse à ces quelques bandits.
  J’ai l’honneur d’être, avec le plus profond respect, Mon colonel, Votre très –humble et très-obéissant serviteur.
                        P de Brian, Capitaine au 62ème de ligne.
 
                                     

                                                          
 


2/ Traduction du rapport du Colonel Diaz-Miron (Mexique) (transmis au Général Ortéga, Commandant de l’Armée d’Orient.)
                                              

Armée d’Orient
Général en Chef.

                                   Citoyen Ministre,                                        


   Le colonel Manuel Diaz-Miron, Commandant militaire de l’état de Vera –Cruz, par dépêche du 31 du mois dernier, datée d’Actopan, m’écrit ce qui suit :
   «  Ayant reçu avis qu’avant-hier, il était arrivé à Plan d’El Rio, un convoi  venant de Jalapa avec vingt voitures vides et escortées par une force française assez considérable, je me mis en mouvement dans la nuit du même jour, avec une troupe dans le dessein de surprendre l’ennemi, ce qui ne put avoir lieu parce qu’une partie des troupes qui devaient commencer l’attaque en tombant sur les derrières du point désigné, s’égara en chemin et n’arriva  pas à temps.
   Prenant alors le parti de me retirer dans la matinée, je suivis la route nationale et vint prendre position à un point de cette route appelé Organo. Là j’embusquais mes forces disposant de l’autre côté de la route quelques soldats également embusqués et qui devaient ouvrir le premier feu pour attirer l’attention de l’ennemi pendant que le reste tomberait sur ses derrières. Un peu plus en avant je répartis 150 hommes des deux côtés destinés à déboucher et à faire face à l’avant-garde pour la contenir pendant que, d’une autre part, on harcellerait le centre.
   À 7 heures du matin, l’ennemi apparut. Dès qu’il fut à hauteur de nos embuscades celles –ci  ouvrirent sur lui un feu très-vif dont la précipitation l’empêcha de pénétrer plus avant et par suite de se compromettre davantage. Aussi eut-il le temps de former des colonnes d’attaque et de détacher des tirailleurs qui se lancèrent dans l’intérieur du bois et ouvrirent le feu sur nous. Le combat prit alors un autre aspect. Nos troupes cependant se maintinrent dans leurs positions soutenant le feu pendant deux heures et sortant même presque toutes pour se battre à découvert. C’est alors que déboulant par la route nationale la troupe qui s’était égarée dans sa marche sur Plan d’El Rio, et qui arrivait par cette même route ouvrit sur les derrières de l’ennemi un feu très- vif  qui introduisit la confusion dans ses rangs et lui fit promptement lâcher pied. A ce moment mon escorte à cheval chargea, mais elle dut se retirer à cause de sa faiblesse numérique, après avoir perdu quelques chevaux. Pendant ce temps les voitures suivaient rapidement leur chemin chargées de morts et de blessés que les Français enlevaient à mesure qu’ils tombaient, laissant partout des traces de sang. Ma troupe parvint à enlever 10 mules du convoi et en quittant le lieu de l’action on recueillit deux morts du 62ème l’un d’eux officier ou chef, quelques fusils rayés d’infanterie, des baïonnettes et des havresacs.
   Dans cette rencontre nous avons eu cinq morts, seize blessés (dont 2 officiers) et douze disparus. La perte des Français peut s’évaluer à 60 hommes hors de combat. J’éprouve la plus grande satisfaction à vous donner connaissance de ce fait d’arme et je dois ajouter que ce combat acharné a notablement amélioré le moral de nos troupes. Durant l’action, on a vu des traits de valeur et des luttes corps à corps qui font honneur aux défenseurs de l’Indépendance que j’ai eu l’honneur de conduire au combat.
   Le nombre de nos combattants était de 500 hommes tandis que l’ennemi en comptait 1200, la plus grande partie du 62ème de ligne.
   J’ai laissé une force imposante pour intercepter la route et couper la communication. Pour moi, je suis venu occuper avec le reste de ma troupe ce point qui est plus à même de fournir à notre subsistance.
    Je pense faire d’autres mouvements dont je vous parlerai ultérieurement.
    Telle est la relation des faits que j’ai l’honneur de soumettre à votre  haute appréciation. »
                                                         
 Liberté et réformes,
Quartier Général à Saragoza, le 21 janvier 1863
J.G Ortéga


à suivre,